ENTRE CHIEN ET LOUP

 




Une petite nouvelle : un scientifique s'interroge sur sa route !


Entre chien et loup. Il n’y a plus de loup et les chiens n’en sont plus. J’ai du mal à bien situer la position du chien dans l’histoire. Je vois bien un pauvre clébard approché d’une bande d’homo Sapiens pour y chercher autant de caresses que de restes. Le chien n’est bon qu’à échanger des restes contres sa mauvaise odeur, ses parasites et ce qu’on croit être de l’affection. Ils ne leur manquent que la parole, disent en cœur les maîtres canins. Heureusement qu’ils ne l’ont pas, nos éponges affectives, titulaires de nos cœurs de loup. Bon, je me calme, c’est donc l’heure entre chien et loup et je roule encore trop vite. Trop vite pour arriver pas trop tard à mon rendez-vous, pris sans trop réfléchir à l’heure, au temps nécessaire à sa durée et tout et tout. J’en ai marre de rouler comme un con, mais je suis pris dans le système, comme le maître avec son chien. On ne peut plus se lâcher, mon emploi du temps et moi. Et j’ai un métier que je devrais adorer, en être fier, aduler, glorifier…… Oh, Oh, doucement mon vieux, pas la grosse tête, hein… la grosse tête et bientôt la grosse amende. A cette heure là, ils vont plier leur radar à lunettes. Quand je pense : filtrage adapté de compression d’impulsion, détermination des glissements Doppler-Fizeau, processeurs gigaflops, résolution angulaire, tout ça pour me niquer alors que l’ai mérité. Je suis toujours en excès. En excès de vitesse, de vie, de recherche, de doute, de certitude, de tristesse (pas trop), de joie (pas assez). Quand j’arrive le matin vers 7 heures près des villes, les bagnoles qui m’emmerdent sont petites, mal entretenues, avec des phares jaunes qui pleurent de leurs misères d’aller travailler, alors pas question de payer un impôt supplémentaire. Et la maréchaussée les attend, et les prend et les pend de leurs technologies qui devraient sauver les vies et apprendre nos sens, guider nos pas, accompagner nos goûts de grandeur d’âmes. Eh bien, nous, les éternels baroudeurs de la route, en conduite de chasse, tout paré de notre parure de gibier sous la traque de la meute conduite pas le radar, nous esquivons et prenons le risque de la blessure, nous saurons guérir de nos points de suture et de la pénalité infligée comme la marque de notre honneur d’avoir gardé le statut de guerrier. Car nous n’avons jamais eu de vrais accidents, nous faisons attention à ne plus trop boire et nous sommes de vrais professionnels de la route comme les chevaliers étaient de vrais seigneurs. Bon, je m’emballe, je m’emballe, ce n’est pas bon pour mon âge. Cette route, je la connais en gros et je me méfie de cet éclairage aux lampes au sodium, en fait éclairage produit par la décharge électrique dans une atmosphère raréfiée de sodium produisant une lumière jaune intense (raie d’émission D) qui trouve son application dans l’éclairage routier (lampes à vapeur de sodium). Bon, je ne me corrige pas. Je suis scientifique et je voulais être poète. D’ailleurs, après une batterie de tests digne du KGB, la psychologue du laboratoire, abrutie par sa technique, m’a dit que j’étais un poète qui avait revêtu l’armure du scientifique. Je l’ai mal pris car je croyais que tout ça était mal venu pour ce job que je voulais. Je voulais, je voulais, en fait, je ne savais pas ce que je voulais et je ne sais toujours pas. Ils cherchaient un chercheur. Super, un laboratoire, filiale d’un super groupe, bon ça me flattait, et me laissait le goût des couchers de soleil trop beau…. Ça cache l’orage du lendemain et les énormes villas de la maffia. Je déconne, car en bon Breton, on croit que nos couchers de soleil sont les plus purs et que la maffia n’existe pas, que tout est ouvert dans nos coopératives. Le cochon, ça se voit et surtout ça se sent, rien dans l’économie souterraine. Bon, ce n’est pas bon de rouler et de ne penser qu’à des conneries. Je n’aime pas écouter la radio, que des conneries, sauf France Culture et pas toujours et la musique, le matin, ça va encore, mais le soir, c’est la surenchère des animateurs qui sont sans âmes. Allez, il faut ralentir, les lampes au sodium (vapeurs de) éclairent vraiment un max dans ce patelin de misère. Cette bagnole de miséreux  n’avance pas. Et si, elle n’avance pas, mais trop vite pour ce 50. Encore un travailleur endormi, ou alors ces travaux, donc 50 et 70 avant les travaux et le besogneux est encore dans son sommeil, ses rêves de loto et pas dans son cauchemar de points en moins. Je me colle derrière, la jumelle du prédateur d’euros ne me verra pas, et je me laisse aspirer. C’est la double traîtrise, il est la proie et la couverture. Merde, c’est con la vie. Paf : c’est encore plus con que prévu, je vois les cognes qui s’agitent au loin, et il y a un feu entre la victime et le bourreau. Je me calme. Le besogneux passe le feu juste. Je m’arrête. Le flic fait ses gestes réglementaires, il en fait trop. C’est une gonzesse qu’il a prise. Je vais passer au ralenti. Vroum, vroum, je ne fais pas le clown, le chasseur est tout à son gibier. Quel gibier, je ne reconnais même pas cette bagnole, elle est pourrax. La vitre est ouverte. Je croise cette épave à la vitesse que l’on croise ceux qu’on a décidé d’ignorer à cause de leurs mutilations et que l’on veut scruter de toute notre curiosité de charognard. Merde de merde, je croise le regard de la piéta, toute l’innocence du monde s’est concentrée dans ces yeux, et ses yeux étaient pour moi, moi comme un con, dans ma grosse bagnole de nanti qui peut payer toutes ces amandes à venir et partager les points de permis qui me restent. Et je suis déjà à 50 mètres et elle doit chercher ses papiers et moi je cherche et ne trouve rien d’autre que le regard de son monde croisant le mien. Oh la, ça ne vas pas, là. J’ai un coup. Un coup dur dur. Je vais y penser de trop. Quel regard, j’en ai froid dans son dos. Merde, qui a bien pu inventer le regard des innocents pour faire chier les indifférents. Bon, je suis déjà en dehors du bled. Pourquoi ils me doublent, ah oui, je roule toujours à 50, ils vont croire que je suis amoureux. C’est comme ça quand on est amoureux. Mais je ne suis pas amoureux. C’est la première fois que je parle d’un regard au lieu de parler des yeux. T’as de beaux yeux, toi…. Non, là … tu n’as rien…. Il y a … Bon, j’arrête…. Je me concentre…. Donc j’accélère… mon rendez-vous… à la con… avec ce fou…  sujet : neuroleptiques associés dans le cadre pharmaco clinique du traitement des processus mnémoniques et mécanismes biologiques dans la psychophysiologie de la mémoire. Tout ça pour dire, à la place du fou, que de la chimie avec des impacts visuels, ça laisse des traces. Le meilleur exemple, c’est le delirium tremens, soit des épisodes confuso-oniriques, avec des crises épileptoïdes. En clair, on picole, on voit plein de trucs bizarres et on s’agite. Donc si tout est contrôlé, on absorbe, on change sa vision du monde et ainsi son comportement. Pas sympa tout ça. Bon… moi j’y vais…. Parce que mon chef m’a dit d’y aller et qu’il faut que je finisse de payer ma maison, comme tous les autres cons qui seront à cette réunion, préparatoire en plus, et qu’en plus sans ce boulot, je m’emmerderai, même si je me sens bien avec ma Geneviève de femme qui est vraiment pas chiante…. Comparée à ce que les autres mecs disent de leurs gonzesses. Et puis je me sens bien avec elle, le jour et la nuit…. Pour dire…. Fidèle… moi oui…. Par déduction hypothético-déductive et statistique…. Elle… je ne sais pas…. Mais j’espère…. Elle par amour….. C’est quoi l’amour…. Ce n’est pas que les filles en débardeur au printemps… ni…. Merde je revois le regard de la Piéta. Ca va me suivre ce truc là. Faut que je me soigne. Et cette route qui continue dans cette nuit de chien qui n’est pas encore loup, ce jour qui n’arrive pas, cette pluie qui commence, toutes ces tribus qui vont gagner leurs pitances dans les lumières des phares mal réglés comme leurs petits matins. Comment étions-nous il y a 500 ans, 5 000 ans, 50 000 ans. Ca me coince ces questions, ce n’est pas mon domaine l’histoire, la préhistoire, la paléontologie, mais ça m’obsède, tout m’obsède, mes obsessions m’obsèdent surtout. Il y a 50 000 ans, qu’ils disent, ont été pareils au même et ça c’est dingue tout ce qu’on a pu inventer comme conneries, et moi scientifique, j’aide à en inventer d’autres, encore plus dingues, tout ça parce que j’avais décider de faire des choses bien, humanitaires, pour aider le monde à mieux vivre et je me retrouve dans un projet de cinglés pour aboutir, par un protocole de mesures à définir, à l’élaboration d’un modèle matriciel devant valider les impacts des effets conjugués de stimuli multi sensoriels  et de l’assimilation de composés neuro actifs. Bon je me repère. Je verrai bien dans une heure. Le soleil se fraye son chemin dans les nuages. Le temps que je gamberge et voila qu’il se montre, le Dieu Rê, Hélios, Stonehenge, Carnac, et moi qui me retourne dans ma bagnole pour goûter de cette boule thermonucléaire (330 000 fois la masse de la Terre) qui nous fait vivre de là-bas, de très loin, qui nous brûlerait si nous étions seulement de quelques pourcents plus près et nous ferait crever de froid si nous étions seulement de quelques pourcents plus loin. Et elle est là, cette boule, toute rouge, rayant de plus d’effets ce ciel qui s’allume que le ferait tout Hollywood. Hollysky, voila comment il devrait s’appelait le studio qui nous fait ce spectacle. Je vais tamponner les mecs qui me précèdent, en continuant à ne regarder que le Dieu qui chauffe. Et lui, ce soleil…et derrière cette boule faiseuse de vie…. Et oui…la piéta… elle doit avoir donner ses papiers… son nom… français… mariée… elle pense qu’elle va arriver en retard… que son con de chef… tous les chefs sont cons… sinon ce ne sont pas des chefs… que son con de chef, disais-je, va l’engueuler… qu’elle va peut-être pas avoir d’amende… qu’elle a tous ses points … et que c’est pas ses points… et que le taux de TVA est aussi dur pour les pauvres… que les amandes… trois jours de travail pour elle, trois de heures de loisirs pour le cadre sup… elle ne va pas pleurer… elle ne veut pas vraiment… elle ne peut pas sûrement… son mec… encore là… un nouveau… un con… un mec bien… Mais merde ce regard… Je réfléchis, je n’en ai jamais vu de comme ça. C’était toute l’innocence du monde qui était la dedans, toutes les règlements déréglés devraient se faire regardés par cette âme avant d’être édités et appliqués par tous les chefs de la terre. Est-ce vrai que tous les chefs n’ont pas été assez aimé et que c’est pour ça… et la nature… la grâce… La nature, donc, avec un grand N, la Nature a fait peut-être des mecs pour être chefs et a fait également des mecs et des nanas qui n’aiment pas pour être sûr de bien faire des chefs très chefs. Et que font les chefs très chefs, ils aiment pas et refont des chefs et ainsi de suite… C’est une dynastie ça… Je déconne… Je résume : ceux qu’on du bol, c’est ceux qu’on eu de gros câlins, pas trop quand même, et qui ne voulaient pas être chef. Ceux qu’on du bol aussi c’est ceux qui ont ces mecs là, le peu qu’il y a, comme chef lorsqu’ils se retrouvent chefs sans le demander. Le pied de chef, quoi… Bon, tout ça pour dire que ma fille au regard du regard… je suis celui qui voit du regard… n’a peut-être pas conscience de son regard… sinon… elle n’aurait pas ce regard… C’est donc le regard… le regard du regard… c’est bien ce que je disais… elle est la conscience de l’innocence… où plutôt, c’est moi qui est conscience de son innocence, alors qu’elle est coupable au nom du règlement. C’est 50, c’est 50. Si on commence par lâcher à 50, alors on ne finit pas. Et on commence par le regard du regard. Le gens d’arme a bien dû le sentir, qu’il croisait le regard du regard. Service sévices. Bon, ça va pour cette fois, ben non, parce qu’il y a le chef… encore un chef… alors si il y a le chef… Je suis désolé mademoiselle (Elle vit maritalement, c’est mieux, une héroïne mariée, enfin engagée qu’on dit…), mais je dois vous dresser une contravention… quels mots … dresser… contre a vention et pas in vention…  bon, j’ai dit que devais me calmer .. c’est pas bon pour un quinquagénaire … il faut réfléchir pour calculer l’âge… on a une image… plus qu’un âge.


Alain Le Falher


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